Ce pin's veut la peau du smartphone

👀 Ce pin’s veut la peau du smartphone

Le monde de l’après-smartphone n’est peut-être plus très loin. Certains l’avaient imaginé dans des lunettes ou des casques, mais ces objets sont vite passés de mode. Ce qu’ils promettent peut être utile, et divertissant, mais ce n’est pas la prolongement de nous-mêmes comme le téléphone portable l’a été depuis ses débuts.

Ce téléphone a beaucoup changé, notamment avec l’arrivée de l’iPhone il y a plus de quinze ans. Mais au fond, il est resté le même, physiquement : un boîtier qui tient dans la main avec des touches et de plus en plus d’applications pour faire autre chose que téléphoner. Pliable ou pas, son ergonomie, son fonctionnement et son rapport avec nous demeurent fondamentalement les mêmes. Ce qui explique sans doute que le marché faiblisse et cherche son nouveau souffle…

Il fallait bien que ce chavirement arrive un jour. Et ce jour, c’est peut-être demain. Oui, demain, jeudi. Humane, une entreprise fondée par deux anciens d’Apple (tiens, tiens…) qui travaille depuis des années sur un smartphone sans écran, intégré à nos vêtements, l’AI Pin. Et il fait suffisamment de bruit que tout le monde a les yeux braqués sur lui.

On a pu en voir un exemplaire accroché au revers de la veste portée par Naomi Campbell au défilé Coperni lors de la dernière Fashion Week de Milan. Une petite boîte noire, très discrète et en même temps suffisamment visible pour que tout le peuple geek ne voit que ça. Même pas sorti, il est déjà considéré comme une des meilleures inventions de 2023 par le prestigieux Time.

Comment tout cela a été imaginé ? Comment cela fonctionne ? Quelles sont les possibilités ? Les limites ? On en a déjà une petite idée. Mais plus intéressant, il a été conçu pour s’intégrer dans nos gestes, nos habitudes, nos corps…

Et c’est ce que je vais essayer de vous expliquer…

Qui est derrière cette révolution ?

L’AI Pin ne serait pas ce qu’il est sans les gens qui l’ont conçu. Il faut s’arrêter un instant sur leur parcours pour comprendre à quel point c’est essentiel. Derrière Humane, lancée en 2018, il y a un couple, Imran Chaudhri et Bethany Bongiorno, deux anciens d’Apple. Et pas n’importe lesquels.

→ La première a participé au lancement du premier iPad, elle a dirigé le développement de logiciels pour iPhone, iPad, le Mac.

→ Le second a notamment travaillé sur la création de l’interface utilisateur de l’iPhone et on verra plus loin que cela a son importance. C’est un inventeur, c’est d’ailleurs son nom qui est visible sur certains brevets.

Tous les deux ont donc fondé leur propre entreprise pour en faire un nouvel Apple. Et à ce jour, ils ont levé plus de 230 millions de dollars auprès de Microsoft, Qualcomm et Sam Altmann, le PDG d’OpenAi en personne…

L’importance du geste

On n’abandonnera pas son téléphone portable sans de bonnes raisons pour le faire. Imran Chaudhri et Bethany Bongiorno ne le savent que trop bien. Et leur objectif de base, c’est de faire disparaître l’écran, contrairement aux Google Glass et autres casques virtuels qui voulaient nous l’accrocher à la tête d’une manière ou d’une autre.

L’argument est séduisant, pour reprendre Lucas Ropeck de Gizmodo. Je ne connais personne qui n’a pas envie de réduire sa consommation d’écran. Un peu l’argument marketing utilisé par Apple pour vendre sa montre. Mais avec AI Pin, à la différence de l’Apple Watch, la coupure est radicale : le pin’s n’a pas besoin du tout de s’appuyer sur un téléphone portable pour exécuter des tâches complexes.

La manière dont nous sommes accros à nos écrans se reflète dans la nouvelle gestuelle que nous avons adoptée avec eux. Par exemple, le « swipe to unlock » indissociable de l’iPhone est devenu un geste totalement naturel. Et vous devinez qui l’a conçu ? Oui, c’est Imran Chaudhri. Et pour ce faire, son meilleur cobaye a été sa fille qu’il a placée devant un pseudo écran de téléphone et il a regardé les gestes qu’elle faisait de manière instinctive pour s’en inspirer.

Et c’est cet état d’esprit qu’Imran Chaudhri a voulu retrouver avec Humane. Il raconte qu’il a tenté d’imaginer un produit et la gestuelle qui irait avec elle. Et c’est ainsi qu’on l’a vu, dans une vidéo TED où il dévoilait l’AI Pin pour la première fois à sa poitrine, faire et refaire le geste de le mettre en route de la manière la plus fluide possible.

Bon, ce n’est pas pour cela que tout le monde va l’adopter de suite, mais si ça arrive, ça ne sera pas par hasard.

Une grosse couche d’IA

Bon alors, mais comment ça marche tout ça ? Ce qu’on sait aujourd’hui, c’est que l’AI Pin est équipé d’un microphone, d’une caméra, de nombreux capteurs. Au lieu d’un écran, il projette toutes les informations sur la paume de la main, sur un mur ou toute autre surface possible. L’expérience promise est complètement sensorielle.

Tout cela ne fonctionne qu’avec une grosse couche d’AI et en l’occurrence de ChatGPT 4. On comprend mieux l’intérêt de l’investissement personnel de Sam Altman. On pourra téléphoner, se connecter à Internet, interagir avec lui, s’en servir d’assistant virtuel pour organiser son agenda professionnel ou personnel, lui poser toutes les questions qu’on veut. Bref, on pourra faire tout ce qu’on fait avec un téléphone mais sans téléphone. Mais pour le moment, nous n’avons pas tous les détails des fonctionnalités possibles.

Ce que l’on sait, c’est que l’IA fera la différence avec une personnalisation poussée. Ce que promet en plus Humane par exemple, c’est que chacun pourra avoir sa propre AI qui lui ressemble, jusque dans la voix, même quand il s’agira de traduire dans une autre langue.

La promesse d’une interopérabilité entre les mondes physique et numérique.

La promesse aussi de pas mal de craintes comme on va le voir.

Ce qui pourrait mal tourner

Il reste plein de bonnes et de mauvaises raisons pour lesquelles ce nouvel objet pourrait rejoindre le cimetière des innovations :

→ La vie privée : ce qu’on comprend du fonctionnement implique que le pin’s est capable de tout enregistrer de nos journées, de nos rencontres, de nos discussions… Et de le stocker dans un même endroit. Pas très rassurant en termes de protection de la vie privée. Imran Chaudhri a déjà expliqué que l’AI Pin ne serait pas allumé en permanence et que l’on pourra voir ce qu’il appelle « une lumière de confiance » quand il sera branché.

→ La concurrence : il existe déjà sur le marché des gadgets AI bien moins évolué mais qui veulent surfer sur la même promesse. Mais surtout, le même Sam Altman qui investit dans Humane, a annoncé travailler avec Jony Ive, l’ancien designer en chef d’Apple, pour fabriquer un device AI dont la promesse rappelle celle de son concurrent. À suivre.

→ Le prix : on annonce un pin’s à 1000 dollars. Un tarif bien au-dessus des gadgets existants. Mais ce n’est jamais le prix qui a rebuté un early adopter d’Apple, le client clairement visé par Humane.

Et pour savoir s’il y a un « One more thing » derrière tout ça, il faudra donc attendre ce jeudi 9 novembre. On vous fera une petite revue de presse.

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