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Dyson, aspirateur à mythes

👉 le fabricant d'aspirateur devenu designer de génie

🔎 Hello, aujourd’hui je vous raconte l’histoire de James Dyson. Ou plutĂŽt comment Sir James a Ă©crit, lui-mĂȘme, son propre mythe.

👉 OĂč l’on apprend qu’avant les aspirateurs, il a construit et vendu des bateaux pour des contrebandiers.

🧹 Au programme : 1 520 mots pour 6 minutes de lecture.

Enjoy ! David.

PS : nous lançons cette semaine un nouveau format → 45 minutes de conversation avec un entrepreneur. Premier numĂ©ro avec Pierre-AndrĂ© Senizergues, le fondateur de la marque de skate Etnies, c’est dispo sur notre chaĂźne YouTube.

👀 Dyson ou l’échec comme base du mythe

De Dyson, vous connaissez forcĂ©ment les aspirateurs, les sĂšche-cheveux, les ventilateurs. De Sir James Dyson, l’inventeur anglais de l’aspirateur sans sac, vous connaissez sans doute le visage et un peu la story du «self made man».

Ou plutĂŽt son mythe. Car peu importe que les informations soient vraies ou fausses, l’important c’est que tout participe Ă  la crĂ©ation d’un grand rĂ©cit entrepreneurial. L’inventeur de gĂ©nie n’a pas seulement crĂ©Ă© des produits innovants, il a construit sa propre lĂ©gende. Le propre scĂ©nario de sa vie.

D’ailleurs, la principale source d’informations de ce qu’on lit sur James Dyson, c’est
 James Dyson lui-mĂȘme.

Le « self made man »

L’homme et sa machine // © Getty Images

L’histoire de notre hĂ©ros commence comme un roman d’apprentissage. Son pĂšre meurt quand il a neuf ans. Sans rien leur laisser Ă  lui et sa famille. Mais l’école oĂč le paternel enseignait permet Ă  James et son frĂšre de continuer Ă  y aller et de poursuivre leurs Ă©tudes. C’est lĂ  que James dĂ©couvre son goĂ»t pour le design et l’ingĂ©nierie.

La suite est Ă  l’avenant : un peu par hasard, alors qu’il est encore qu’étudiant, il rencontre un industriel qui lui donne un boulot d’ingĂ©nieur et un travail prĂ©cis : imaginer un bateau de dĂ©barquement pour l’armĂ©e. Le jeune homme n’y connaĂźt rien en bateau, mais ça ne l’empĂȘche pas de crĂ©er un prototype qui sera vendu Ă  des militaires du monde entier, des entreprises pĂ©troliĂšres et mĂȘme des contrebandiers. Et la petite histoire veut que ce soit James Dyson qui ait lui-mĂȘme jouĂ© les commerciaux.

AprĂšs l’infiniment grand, l’infiniment petit, ou l’inverse. James dĂ©cide de crĂ©er sa propre entreprise et de se lancer un dĂ©fi gigantesque sur un objet modeste que tout le monde possĂšde : l’aspirateur.

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Le bon sens prĂšs de chez vous

Le G-Force, lĂ  oĂč tout a commencĂ©, le design du Minitel x le premier TGV // © Dyson

Son premier aspirateur sans sac, il en a trouvĂ© l’idĂ©e en 1978 alors qu’il est en plein dĂ©mĂ©nagement. Il s'Ă©nerve sur un aspirateur dĂ©fectueux et, en bon ingĂ©nieur, il le dĂ©monte pour comprendre l'origine du problĂšme. Et constate que le sac est encrassĂ©. Il imagine alors le G-Force, un aspirateur sans sac, qui fonctionnerait avec un systĂšme de sĂ©paration cyclonique. Lumineux.

Et le sans-fil ? Comme on se dit que ça serait bien d’avoir un tĂ©lĂ©phone-ordinateur qui tient dans la poche, chez Dyson on se demande si on ne peut pas faire autrement que :

→ sortir son aspirateur du placard

→ dĂ©rouler le cordon

→ faire une premiùre piùce

→ le dĂ©brancher

→ le rebrancher dans une autre piùce

→ enrouler le cordon.

Et voilĂ , des centaines de millions de dollars plus tard, voici le DC59 Motorhead, l’aspirateur/objet de dĂ©co qu’on n’a pas mĂȘme plus envie de mettre au placard.

Seul contre tous

Belles bĂȘtes quand mĂȘme // © Getty Images

Mais voici venu le temps des Ă©preuves. Celles qui permettent de grandir dans l’adversitĂ©, d’apprendre la rĂ©silience et de triompher Ă  la fin aprĂšs avoir cru que tout Ă©tait perdu. Et ces Ă©preuves, elles commencent par la conception de ce fichu aspirateur sans sac.

Dyson va mettre cinq ans et 5216 prototypes, et donc 5216 Ă©checs, avant de trouver la solution miracle avec le prototype numĂ©ro 5217. Mais les Ă©preuves ne font que commencer et l’histoire vire au film de complot. Car quand James dĂ©marche les constructeurs d’aspirateurs pour leur vendre une licence de sa trouvaille, ceux-ci refusent pour trois raisons :

→ Ils sont court-termistes.

→ Ils prĂ©fĂšrent continuer Ă  fabriquer leurs produits, aprĂšs tout, ça fait des siĂšcles que ça marche.

→ Ils veulent conserver leurs marges de fous sur la vente des sacs à aspirateur.

Bref, ils font tout pour enterrer l’idĂ©e de James, qui dĂ©cide de crĂ©er sa propre usine. Et c’est lĂ  que tout hĂ©ros a besoin d’un coup de pouce du destin.

L’effet papillon

source : Dyson

Comme dans tout bon mythe, il faut ce petit rien qui change tout, ce petit geste anodin qui à la fin, bouleverse tout et sauve notre héros. Et bien dans notre histoire à nous, il y en a deux :

→ Au moment oĂč James construit son premier prototype d’aspirateur sans sac, il est endettĂ© Ă  hauteur de 2 millions de livres. Et il n’y a aucune raison que sa banque ne continue Ă  lui faire crĂ©dit.

Sauf qu’un soir, le directeur de la banque rentre chez lui et demande Ă  sa femme ce qu’elle pense des sacs d’aspirateurs et elle lui rĂ©pond que c’est une Ă©pouvante. Devinez ce que fera le banquier ?

→ DeuxiĂšme moment-clĂ©, quand James commence Ă  attaquer le marchĂ© amĂ©ricain. Il a envoyĂ© outre-Atlantique des exemplaires de son aspirateur. Il attend un retour qui tarde Ă  venir. La situation stagne, le dĂ©veloppement de l’entreprise est en jeu.

Sauf qu’un jour, une jeune vendeuse d’une grande chaĂźne de magasin d’électromĂ©nager en emmĂšne un chez elle. Le lendemain, elle revient et dit Ă  son patron que ce produit est fantastique. Ce dernier l’écoute et le met en vente dans 50 magasins en mĂȘme temps. C’est le dĂ©but de l’aventure amĂ©ricaine.

Dyson, un gĂ©ant de l’électromĂ©nager

  • 7,3 milliards d’€ : le chiffre d’affaires de Dyson sur l’annĂ©e 2022 pour un bĂ©nĂ©fice de 1,3 milliard d’€

  • 2,75 milliards de ÂŁ : le montant des investissements programmĂ©s pour la pĂ©riode 2020-2025

  • 2 000 : le nombre de nouvelles embauches rien qu’en 2022

  • 23 milliards de ÂŁ : la fortune estimĂ©e de Sir James Dyson

  • 27 hectares : la taille de l’usine du groupe en Angleterre qui comporte 169 laboratoires.

  • 9,7 milliards d’€ : la taille du marchĂ© de l’électromĂ©nager en France

Sa force ? Être faillible

Vous avez déjà vu des aspirateurs dans des vitrines de grands magasins vous ? // © Getty Images

Personne d’autre que lui n’a autant tournĂ© l’échec comme un avantage. Il le porte mĂȘme en Ă©tendard. James a beau ĂȘtre un gĂ©nie, il reste faillible comme vous et moi. D’ailleurs les mots « Ă©chec » ou « Ă©chouer » apparaissent des dizaines de fois dans son autobiographie. Des exemples :

→ Il doit arrĂȘter la commercialisation de sa machine Ă  laver Ă  deux tambours au bout de cinq ans Ă  cause d’un coĂ»t de production trop important.

→ Il stoppe les recherches sur la voiture Ă©lectrique qu’il Ă©tait en train de mettre au point. La facture est Ă©norme.

→ Ce dĂ©fenseur affichĂ© de l’industrie britannique (et du Brexit) s’est fait prendre en train de transfĂ©rer son siĂšge social Ă  Singapour.

Dans la construction du mythe, le moindre Ă©chec devient une force, une source de rĂ©silience. Son Ă©chec dans la voiture Ă©lectrique par exemple est devenu l’histoire d’un capitaine d’industrie capable de perdre 600 millions de dollars de ses propres deniers sur une vision de l’avenir.

L’autre matrice du mythe et du succĂšs, c’est le fameux « bon sens ». James Dyson a beau vendre ses objets hyper design dans des corners hyper luxe, ils restent des produits du quotidien.

Glamour cĂŽtĂ© face, et antihĂ©ros qui carbure Ă  l’échec et au bon sens cĂŽtĂ© pile. Il prĂ©fĂšre ainsi recruter de jeunes diplĂŽmĂ©s sans bagage pour profiter de leur enthousiasme et leur curiositĂ©. Il crĂ©e une usine gĂ©ante oĂč sont testĂ©s tous les produits de la marque jusqu’à l’excĂšs. À la clĂ©, des vidĂ©os impressionnantes rĂ©alisĂ©es sans trucage.

Et en vrai ?

James Dyson pose devant sa voiture électrique qui ne verra jamais le jour // © Dyson

En vrai, tout ce qu’on raconte sur James Dyson est sĂ»rement vrai. Son rĂ©cit est devenu la matrice de tous les discours vantant l’échec comme un apprentissage de la rĂ©ussite, comme la carte de visite obligĂ©e de tout startuper. SĂ»r que toute cette histoire de mythe y est pour beaucoup dans tout ça. Ce n’est pas le tout d’avoir un bon produit. C’est quand mĂȘme mieux d’avoir l’histoire qui va avec.

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