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La quête du Duolingo d’or

👉 qui est derrière l'app n°1 de langues étrangères

🔎 Hello, on vous raconte cette semaine comment Duolingo est devenue l’application numéro 1 pour apprendre une langue étrangère.

👉 Où l’on apprend que son cofondateur a réinventé le test de Turing.

🧨 Au programme : 1 758 mots pour 6 minutes de lecture.

Enjoy ! David.

👀 La quête du Duolingo d’or

500 millions d’utilisateurs, 70 millions actifs par mois, 14 millions chaque jour. Voilà en chiffres, ce que pèse aujourd’hui Duolingo, leader incontesté des applications d’apprentissage de langues étrangères.

Derrière ces chiffres, il y a la story d’un pur inventeur de génie qui a réinventé le test de Turing moderne : Luis von Ahn. Devenu riche grâce à ses inventions qui ont marqué l’histoire de l’Internet, cet informaticien s’est mis au service d’une cause : démocratiser l’apprentissage des langues.

Pour réussir son pari, il a monté Duolingo avec deux principes en tête : ça doit rester gratuit et le jeu en sera le moteur. Résultat : le hibou vert, mascotte de la marque, est devenu un compagnon de notre quotidien.

On pourrait croire que l’intelligence artificielle va bouleverser ses plans. Mais en inventeur, il a déjà intégré cette donnée depuis un moment dans son plan de marche.

Dis comme ça, ça a l’air simple. Et c’est vrai que ce succès tient en quatre points.

Je vais tenter de vous les expliquer.

NB : vous avez été nombreux à vous abonner depuis le lancement de notre nouvelle newsletter du vendredi matin dans laquelle on vous résume les 3 histoires qu’on a adorées pendant la semaine et qu’on vous conseille pour votre week-end. Si ça vous intéresse, et que vous n’êtes pas encore abonné, il suffit de cliquer sur le bouton juste en dessous.

1. Une gratuité revendiquée

Celui que l’on surnomme « l’homme derrière la chouette » // © Luis von Ahn

Depuis le début, Duolingo est gratuit. Alors oui, vous pouvez vous abonner pour éviter la publicité et réussir les épreuves quotidiennes plus facilement. Et on peut toujours se dire rétrospectivement qu’il s’agissait juste de la stratégie classique qui consiste à attirer les utilisateurs et acquérir une position dominante avant de rechercher la rentabilité. Mais fondamentalement, l’application est gratuite. Cela tient sans doute à la personnalité d’un de ses deux fondateurs et son visage le plus plus connu, en dehors de leur mascotte : Luis von Ahn.

Au début des années 2000, cet informaticien guatémaltèque se destine à devenir mathématicien mais c’est un autre genre de problème qui va changer sa vie. Il assiste à une conférence de Yahoo qui explique son impuissance devant les millions de robots qui s’inscrivent sur leurs comptes. À ce moment, aucun ordinateur ne fait la différence entre humain et non-humain.

Alors Luis von Ahn va inventer la CAPTCHA, ce test de Turing que nous utilisons encore aujourd’hui, et il va la donner à Yahoo.

Oui, la donner.

Gratos.

Tout cela ne l’empêche pas de gagner de l’argent par la suite, en vendant plusieurs de ses inventions à Google, dont une méthode de numérisation de texte qui a servi à mettre en ligne les archives du New York Times. À ce moment, le professeur d’université Luis von Ahn est assez riche pour se lancer dans le projet de ses rêves : démocratiser l’apprentissage des langues. En 2009 avec un étudiant, Severin Hacker, il conçoit une méthode d’apprentissage des langues basées sur l’analyse de données.

Deux ans plus tard, c’est la naissance de Duolingo avec six langues. Au départ, c’est à la fois un site web qui aide les gens à apprendre une langue étrangère en ligne tout en utilisant leur travail pour traduire des textes pour des clients. Ceux qui apprennent sont ceux qui travaillent, et ils font les deux gratuitement.

Mais deux ans plus tard, il n’y a pas assez de clients pour la seconde activité alors Duolingo devient ce qu’on connaît aujourd’hui : une application pour smartphone pour l’apprentissage de langues. Les cours sont alors assez rudimentaires, mais à force de levées de fonds, le programme s’étoffe et séduit très vite des millions d’utilisateurs. Notamment parce qu’il est gratuit.

Même si une version payante est lancée en 2017, cette gratuité reste au cœur de la stratégie avec l’introduction cette même année, des publicités Google et Facebook. Et elle le restera car pour Luis von Ahn, il y a une quête qui le dépasse qui prend racine dans le fait d’avoir grandi dans un pays pauvre. Dans toutes les interviews, il affirme vouloir que les gens puissent apprendre gratuitement.

D’ailleurs, les deux dernières innovations de la société, Duolingo Math et Duolingo ABC — pour les enfants — sont gratuites et sans publicité pour le moment.

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2. Une gamification ultime

En même temps, difficile de ne pas craquer… // © Duolingo

Il n’y a pas que la gratuité qui peut expliquer le succès de Duolingo. Si vous avez déjà essayé l’application, vous savez à quel point tout est organisé pour que vous succombiez aux charmes ludiques de l’application. Car tout est jeu, et en temps réel.

Plus vous pratiquez, plus vous avez envie de collectionner les gemmes, la monnaie en cours sur l’application, plus vous devez progresser dans des ligues aux noms clinquant (Saphir, Rubis, Émeraude, Perle, Diamant) où la compétition devient de plus en plus acharnée, plus vous voulez remporter les tournois… Et à tout moment, si vous n’êtes pas assez présent, vous êtes menacé de relégation dans une ligue inférieure. Mais forcément, plus vous jouez, plus vous vous exercez dans cette langue que vous voulez apprendre.

Et là où cette logique est encore plus forte, c’est que la version payante ne permet pas seulement de « jouer » sans les publicités, elle vous donne des armes pour aller plus loin dans la gamification, elle vous rend plus fort. On comprend pourquoi le New York Times l’a qualifiée d’application plus addictive que Candy Crush.

Tout cela repose aussi sur un algorithme très précis qui vous pousse à avoir 80% de chances de répondre correctement à une question. Pourquoi 80% ? Parce qu’au-dessus on s’ennuie, et en dessous on se sent bête. Tout ça, c’est quand vous êtes accro.

Et que se passe-t-il quand vous décrochez un peu ? Vous vous exposez juste à l’équivalent de la marche de la honte de la saison 05 de Games of Thrones.

3. Un marketing passif-agressif

Alors, vous cliquez ? // © Duolingo

Duolingo a développé un ton bien à elle, parfois à rebours des pratiques existantes. Mélange d’incitations passives-agressives, d’humour à deux balles, et de relances bien culpabilisantes : on vous informe qu’une de vos connaissances vous a dépassé, qu’il ne vous reste plus qu’une heure pour ne pas être rétrogradé de ligue, que vous allez briser votre série de 235 jours de suite à utiliser l’application…

Le journaliste Mark Serrels a raconté dans un article très drôle son addiction à Duolingo, quand gagner était devenu plus important que d’apprendre l’espagnol. Il explique comment l’application a tout fait pour le faire revenir quand il a arrêté de pratiquer : « J'ai regardé avec horreur une application de téléphonie mobile passer par toutes les étapes du deuil pour tenter de me récupérer ».

Ça, c’est pour la partie extrême. La plupart du temps, les notifications de Duolingo sont souvent drôles si on les prend avec un peu de recul. L’application sait se moquer d’elle-même et cela s’incarne dans sa mascotte, un hibou vert omniprésent. Et il faut voir comment elle se met en scène sur TikTok pour comprendre pourquoi Duolingo y est suivi par plus de 8 millions d’abonnés.

Et ce n’est pas tout. Duolingo a aussi développé la stratégie dite de Starbucks. Vous savez, la légende qui veut que votre prénom soit mal orthographié sur le gobelet pour que vous le mettiez sur les réseaux sociaux et que vous leur fassiez de la pub. Avec Duolingo, les gens adorent partager les phrases bizarres qu’on vous propose de traduire, genre « la souris achète une maison », « le poisson ne vous aime pas », « cette maison a mille fenêtres » « 90 œufs s’il vous plaît » … (vécu).

Que des bizarreries que vous n’utiliserez jamais dans une conversation, mais au potentiel viral certain.

Duolingo, un géant de l’éducation en ligne

  • 54 millions : le nombre d’utilisateurs actifs par mois en 2022 vs 37 millions en 2021

  • 500 millions : le nombre de téléchargements de l’application en 2020, pendant la pandémie

  • 3,4 milliards de $ : la valorisation boursière de Duolingo en 2022

  • 102 : le nombre de langues disponibles sur Duolingo (en comptant aussi de fausses langues venues de l’univers Game of Thrones, ou Star Trek)

Sources : TechCrurnch/VentureBeat/CNBC

4. Une révolution IA déjà en marche

Voici à quoi ressemble une chouette dopée à l’IA // © Duolingo

On pourrait croire que l’explosion de l’IA générative et son potentiel de traduction sont un danger pour Duolingo. Mais pas vraiment à ce stade. Car elle va peut-être l’aider à résoudre une des principales critiques émises à son encontre : quelle est l’utilité de Duolingo dans la vraie vie ?

Certes Duolingo n’a jamais prétendu remplacer l’apprentissage en immersion, mais elle apprend peut-être plus la langue de Duolingo que celle du monde réel. En tout cas, les meilleurs de la ligue Diamant ne sont certainement pas bilingues grâce à ça.

C’est là où intervient l’IA. Dès 2020, Duolingo a commencé à utiliser GPT pour améliorer le test d’aptitude à l’anglais qu’elle propose (l'équivalent du TOEFL). L’idée est d’être en mesure de proposer ce qui manque aujourd’hui le plus pour parfaire l’apprentissage d’une langue via une application : la conversation. Alors, Duolingo pourra proposer des tutorats individuels complets, son Graal. Plusieurs expériences d’apprentissages interactives sont déjà à l’essai.

Et puis au cas où l’apprentissage des langues venait à être un marché moins porteur, Duolingo travaille en ce moment à la création de cours mais aussi à une application musicale.

Après « tous multilingues », « tous virtuoses ».

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